Création

Nous sommes plongés dans l’aventure de la Création, exploit des plus redoutables, sans « fins morales », et peut-être sans signification ; et quoique l’idée et l’initiative en reviennent à Dieu, nous ne saurions lui en vouloir, tant est grand à nos yeux son prestige de premier coupable. En faisant de nous ses complices, il nous associa à cet immense mouvement de solidarité dans le mal, qui soutient et affermit la confusion universelle.

Emil Cioran, Essai sur la pensée réactionnaire, Fata Morgana, p. 28.

Guillaume Colnot, 11 juin 2004
essuient

Quand les Hollandais essuient un coup de vent en haute mer, ils se retirent dans l’intérieur du navire, ferment les écoutilles et boivent du punch, laissant un chien sur le pont pour aboyer à la tempête ; le danger passé, on renvoie Fidèle à sa niche au fond de la cale, et le capitaine revient jouir du beau temps sur le gaillard. J’ai été le chien hollandais du vaisseau de la légitimité.

François-René, vicomte de Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe (1), Le livre de poche, p. 245.

Guillaume Colnot, 17 mai 2007
bonheur

Ce qu’il y a d’admirable dans le bonheur des autres, c’est qu’on y croit.

Marcel Proust, « lettre à Antoine Bibesco », Correspondance.

David Farreny, 25 mai 2009
négative

Nous pouvons être d’avis qu’il y a de l’entendement dans le comportement des étoiles les unes par rapport aux autres ; mais elles relèvent de la répulsion morte. […] L’armée des étoiles est un monde formel, parce que seule cette détermination unilatérale dont il vient d’être question s’y fait valoir. […] On peut vénérer les étoiles en raison de leur calme, mais elles ne sont pas à mettre, quant à la dignité, au même rang que l’être individuel concret. Le remplissement de l’espace est l’éruption d’une multitude infinie de matières, mais c’est là seulement la première éruption à pouvoir divertir le regard. Cette éruption de lumière est aussi peu digne d’admiration qu’une éruption en l’homme ou que la multitude des mouches. Le calme de ces étoiles intéresse l’âme de plus près, les passions s’apaisent lorsqu’on intuitionne ce calme et cette simplicité. Mais ce monde n’a pas, quand on se tient au point de vue de la philosophie, l’intérêt qu’il a pour la sensation. Qu’un tel monde s’étende en tant que multitude dans des espaces incommensurables, cela ne signifie absolument rien pour la raison ; c’est ce qui est extérieur, vide, l’infinité négative.

Georg Wilhelm Friedrich Hegel, « Des manières de considérer la nature (additions) », Encyclopédie des sciences philosophiques, II. Philosophie de la nature, Vrin, p. 375.

David Farreny, 28 fév. 2011
tour

En sortant de voiture, je me suis avancé tout de suite entre les arbres. J’avais emporté avec moi une petite bouteille d’eau de source locale, que je tenais à la main faute d’avoir songé à acheter un sac à bandoulière, voire un sac à dos, et, tout en marchant, je projetais à quelques centimètres de haut ma petite bouteille, en la faisant pivoter en l’air, puis je la rattrapais quand elle avait fait un tour sur elle-même. J’ai modestement jonglé comme ça cinq minutes, après quoi je me suis concentré sur ma promenade.

Christian Oster, Rouler, L’Olivier, p. 39.

Cécile Carret, 27 sept. 2011
rêvaient

Un moment, ils restèrent ainsi, en position horizontale, dévêtus, couchés côte à côte sous leurs légères couettes d’été.

Puis une étrange lueur brilla derrière leurs paupières closes, et ils se levèrent, se quittèrent, traversèrent les murs, les années, s’en allèrent dans différentes directions, par des sentiers inconnus d’eux-mêmes, revêtus désormais de toutes sortes de costumes imaginaires.

Le miracle quotidien s’était accompli ; ils rêvaient.

Dezsö Kosztolányi, Anna la douce, Viviane Hamy, p. 48.

Cécile Carret, 4 août 2012
espoir

Pour revenir aux parties de cache-cache, elles aiment à la folie ce jeu qui apprend à se séparer et à garder espoir alors même qu’on patiente dans la solitude et l’obscurité, comme disait Freud. Et comme il est ardu de conserver cet espoir lorsque c’est Manon qui cherche et qu’elle n’est pas douée pour trouver.

Emmanuelle Pyreire, Foire internationale, Les Petits Matins, p. 39.

Cécile Carret, 13 avr. 2013
stopper

L’objectif est toujours le même : stopper l’hémorragie.

Jean-Pierre Georges, « Jamais mieux (3) », «  Théodore Balmoral  » n° 71, printemps-été 2013, p. 112.

David Farreny, 12 juin 2014
y

Étrange lieu que la solitude – sans issue lorsque l’on s’y trouve ; sans accès lorsque l’on n’y est pas.

Éric Chevillard, « jeudi 13 juin 2013 », L’autofictif. 🔗

Cécile Carret, 12 sept. 2014

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