assonances

Ces exercices deviennent vite verbaux, fondés sur un art du calembour qui prend la place de la réflexion ; les assonances entre les termes, les homophonies et les ambiguïtés fournissant progressivement la matière de ces coups de théâtre spéculatifs à l’ingéniosité desquels se reconnaissent les bons travaux philosophiques.

Claude Lévi-Strauss, Tristes tropiques, Plon, p. 53.

David Farreny, 29 nov. 2003
remblais

Communiquer ? Toi aussi tu voudrais communiquer ?

Communiquer quoi ? Tes remblais ? — la même erreur toujours. Vos remblais les uns les autres ?

Henri Michaux, « Poteaux d’angle », Œuvres complètes (3), Gallimard, p. 1065.

David Farreny, 7 août 2006
inédite

On y reviendra à cette évidence toujours à redire, et en particulier à propos du scandale, pierre d’achoppement de la déroute, car il se joue là un phénomène étrange, touchant au mystère même d’écrire, qui est qu’une métaphore n’atteint sa toute-puissance que lorsqu’elle est concrètement inédite, entraînant dans un même mouvement l’écrivain et son lecteur sur les terra incognita de cet univers infini qu’est la langue. Serait-elle neuve à l’oreille du lecteur, une métaphore préexistant à l’écriture d’un texte ne sera jamais qu’une métaphore tirée à blanc ; ce n’est pas seulement la lecture qui en est faite qui lui donne sa puissance de déflagration dans la langue, cela se joue en amont, à l’instant du surgissement dans l’écriture, comme s’il fallait qu’il y ait eu déflagration éprouvée par l’auteur au moment de l’écriture pour que le lecteur la ressente à son tour. Qu’il en soit ou non le créateur, un écrivain répétant une métaphore, quand bien même celle-ci serait inconnue du lecteur, provoquera peut-être de l’intérêt, de l’adhésion, du plaisir (celui-là même que l’auteur a pris à la répéter), mais pas ces étincelles mystérieuses qui jaillissent entre auteur et lecteur du plus obscur de la forge individuelle où se travaille la langue de tous.

Bertrand Leclair, Théorie de la déroute, Verticales, p. 20.

Cécile Carret, 26 août 2009
échelle

On le voit, ce ne sont pas des projets étriqués car il ne convient à Grégor que d’affronter de vastes dimensions. Très tôt, parmi celles-ci, lui vient la certitude qu’il ferait bien par exemple un petit quelque chose avec la force marémotrice, les mouvements tectoniques ou le rayonnement solaire, des éléments comme ça – ou, pourquoi pas, histoire de commencer à se faire la main, avec les chutes du Niagara dont il a vu des gravures dans des livres et qui lui semblent assez à son échelle. Oui, le Niagara. Le Niagara, ce serait bien.

Jean Echenoz, Des éclairs, Minuit, p. 15.

Cécile Carret, 9 oct. 2010
éternité

À l’école, la nonne nous a dit que ça durerait pour l’éternité, a-t-elle continué en enlevant la peau de sa truite. Et quand nous avons demandé combien de temps durait l’éternité, elle a répondu : « Pensez à tout le sable de l’univers, toutes les plages, toutes les carrières de sable, le fond des océans, les déserts. À présent, imaginez tout ce sable dans un sablier, comme un gigantesque minuteur. Si un grain de sable tombe chaque année, l’éternité est la longueur de temps nécessaire pour que tout le sable du monde s’écoule dans ce sablier. » Rendez-vous compte ! Ça nous a terrifiées.

Claire Keegan, L’Antarctique, Sabine Wespieser, p. 19.

Cécile Carret, 19 déc. 2010
mènent

Ses escaliers crèvent les plafonds ; puis j’enrage de manquer d’imagination pour deviner où ils mènent et visiter cette étoile.

Éric Chevillard, Dino Egger, Minuit, p. 104.

Cécile Carret, 18 fév. 2011
autrui

C’est incontestable, on a parfois besoin d’autrui. Je n’aurais jamais réussi à m’ennuyer comme ça tout seul.

Éric Chevillard, « mardi 21 mai 2013 », L’autofictif. 🔗

David Farreny, 21 mai 2013
revient

Réflexions sur le commandement : il n’y a pas de génies méconnus. Chacun trouve dans la vie la place qui lui revient. Nous sommes nés avec l’exact potentiel social que nous réaliserons…

Ernst Jünger, « 24 juin 1940 », Journaux de guerre (2), Gallimard.

David Farreny, 7 mars 2014
frais

Pour manger frais ton pain rassis, fais un petit effort de mémoire.

Éric Chevillard, « mercredi 17 décembre 2014 », L’autofictif. 🔗

David Farreny, 17 déc. 2014
redécouvrir

Ce n’était donc que ça, une vie ! Redécouvrir l’une après l’autre toutes les sensations que vos prédécesseurs avaient découvertes. Et ne pas avoir le temps de faire un pas de plus. Vagues l’une sur l’autre… Jamais une plus loin que les autres… Le même effort. Le même échec. Quelle lassitude !

Philippe Muray, « 30 mai 1986 », Ultima necat (II), Les Belles Lettres, p. 88.

David Farreny, 2 mars 2016

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