absurdes

Armande avait beaucoup de traits de caractères fâcheux, pas si rares à vrai dire, qu’il acceptait en bloc comme les clés absurdes d’une ingénieuse devinette.

Vladimir Nabokov, La transparence des choses, Fayard, pp. 98-99.

David Farreny, 20 mars 2002
forme

Une femme qui m’avait occupé l’esprit et le cœur, sans cesse, et qu’il me suffisait de voir ou d’évoquer pour me dire que la vie avait une forme.

Christian Oster, Une femme de ménage, Minuit, p. 8.

David Farreny, 21 mars 2002
mauvaise

Il n’est pas passé cependant, ce commun voyage en ligne droite par la montée de la petite rue pavée, avec le retour par l’allée qu’éclairait le soleil du soir ; il est toujours présent et c’est pourtant une mauvaise plaisanterie que de le dire présent.

Franz Kafka, Lettres à Milena, Gallimard, p. 82.

David Farreny, 22 mars 2002
reposer

Il faut choisir : se reposer ou être libre.

Thucydide.

David Farreny, 23 mars 2002
distraction

Si l’on essaie un jour de décrire l’économie générale des tabous de notre temps, il ne faudra pas manquer de mettre en contradiction la pudique indignation de notre société devant les spectacles relevant de l’érotisme par exemple, et son indulgence pour la représentation de tout ce qui dégrade les hommes. C’est sans doute qu’elle y a son intérêt et qu’il lui est nécessaire pour se maintenir de donner à ses aliénations réelles le masque rassurant d’ « une saine distraction ».

Roland Barthes, « Le Grand Robert », Œuvres complètes (1), Seuil, p. 523.

David Farreny, 17 nov. 2004
larges

Addio, cari… C’est curieux, les plaisanteries d’Inga et de ses grandes amies, de ces Femmes damnées : de petites plaisanteries de religieuses, de « bonnes sœurs ». À notre avant-dernière réunion, dans cette grande ville pleine d’appels joyeux, de fleurs et de parfums, chaque matin je répétais plusieurs fois : « Je vais me lever. » Alors elle disait : « Tu vas te lœwer ? tu vas devenir un lion ! Oh, j’ai peur, tu vas me dévorer. » Et elle riait, comme si ce jeu de mots était extrêmement drôle. Ah, oui : la petite fille en elle. C’était bon aussi, ces matins-là. L’été. Les grandes avenues bien ombragées, larges, toutes pleines de l’été et d’une belle vie lente et heureuse. On en voyait trois de nos fenêtres.

Valery Larbaud, « Amants, heureux amants... », Œuvres, Gallimard, pp. 634-635.

David Farreny, 2 nov. 2009
gazon

35. Sujets de poésies

La capitale. La puéraire. La bardane d’eau. Le poulain. La grêle. Le bambou nain. La violette à feuilles rondes. Le lycopode. L’avoine d’eau. La sarcelle. Le canard mandarin. Les massettes poussées çà et là, en automne. Le gazon. La liane verte. Le poirier. Le jujubier. Le « visage du matin ».

Sei Shônagon, Notes de chevet, Gallimard, p. 92.

David Farreny, 12 avr. 2011
parallèles

Heureusement pour moi, arriva un petit garçon de treize ans au visage couvert de taches de rousseur et qui lui aussi était énurétique. On nous mit ensemble. C’état un petit garçon troublé et merveilleux, d’une intelligence vive et immédiate, qui devinait et comprenait tout et ne jugeait jamais. Nous éprouvâmes instantanément une amitié entière l’un pour l’autre, absolue et sans limites, nous n’étions véritablement qu’une seule âme et, de ma vie, je n’ai plus jamais aimé aucun être de cette façon, de cet amour très particulier de l’amitié extrême qu’on n’éprouve probablement que dans l’enfance. C’était un amour absolument pur, dénué de ce trouble affectif si fréquent des amitiés de pensionnat, il se manifestait par une connaissance instantanée des pensées de l’autre. Il doit exister des âmes parallèles que seul le plus grand des hasards fait se rencontrer.

Georges-Arthur Goldschmidt, La traversée des fleuves. Autobiographie, Seuil, p. 201.

Cécile Carret, 15 juil. 2011
oblige

Tendance à la lecture en diagonale. Donc, qu’est-ce qu’un grand écrivain ? Quelqu’un qui m’oblige à lire ligne à ligne et mot à mot. C’est rare.

Philippe Muray, « 20 septembre 1990 », Ultima necat (III), Les Belles Lettres, p. 379.

David Farreny, 29 fév. 2024
compagnie

Jour après jour, week-end après week-end, j’enviais secrètement l’aptitude de mes amis à s’amuser ensemble et les méprisais pour ne pas envier mon inaptitude à m’amuser avec eux. Je m’en voulais surtout de mon impuissance à planter là leur ennuyeuse compagnie, effrayé encore et toujours de penser qu’ayant été de trop, je ne manquerais à personne. Mais je sentais venir la rupture.

Frédéric Schiffter, « Je chute, donc je pense », Pensées d'un philosophe sous Prozac, Milan.

David Farreny, 12 mai 2024

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