Les Norvégiens sont translucides ; exposés au soleil, ils meurent presque aussitôt.
Michel Houellebecq, Lanzarote, Flammarion, p. 18.
Le slow qui tue est une machine logique à décollage vertical.
Pascal Comelade, Écrits monophoniques submergés.
La réalité est autre. La réalité est une marâtre.
Pierre Michon, « Neuf passages du causse », Mythologies d’hiver, Verdier, p. 81.
On n’entend rien aux religions si l’on croit que l’homme fuit une divinité capricieuse, mauvaise ou même féroce, ou si l’on oublie qu’il aime la peur jusqu’à la frénésie.
Emil Cioran, Essai sur la pensée réactionnaire, Fata Morgana, p. 24.
Dilemme : le fusil ou le travail.
Jean-Pierre Georges, Le moi chronique, Les Carnets du Dessert de Lune, p. 24.
Autre chose. Le « brasier », dont Brive est bâtie, n’est pas, comme je croyais, d’origine permo-carbonifère mais triasique. Mouret insiste sur la médiocrité de ce matériau, gélif, pulvérulent, impropre à livrer des arêtes vives. C’est pourquoi les joints de mortier débordent sur les moellons.
Pierre Bergounioux, « mardi 3 août 1999 », Carnet de notes (1991-2000), Verdier, p. 1095.
Ainsi, lorsque la main, errant légèrement sur le Grand-Trésor caché dans la nuit et sous des voiles, rencontre le bien fragile et sans prix d’un sein nu. Délicieuse étude : la douceur, la chaleur, le poids, la vie généreuse, innocente et désarmée. Toute l’attention dont l’esprit est capable se concentre dans cette bienheureuse main. Oh ! qu’elle soit très attentive et que, sans bouger de toute la nuit, maintenant que nous allons dormir, elle se pénètre, pour ne plus l’oublier de la vérité qu’elle tient !
Valery Larbaud, « Mon plus secret conseil... », Œuvres, Gallimard, p. 691.
il y aura une fois
une chair qui se dénouera
sans cris ni larmes
cela aura lieu quelque part
Entre deux cailloux secs
Entre l’écorce et l’arbre
Au premier chant des bielles
À l’instant de la dernière cigarette
Il y aura une fois
deux yeux qui rouleront à fleur d’eau sale
vers le grand collecteur
Il y aura une fois l’instant fatal
où je devinerai enfin ce visage réel
si longtemps masqué
par le vol futile de deux ramiers
la sirène émouvante d’un remorqueur Quai de l’arsenal.
André Laude, « Testament de Ravachol », Œuvre poétique, La Différence, p. 231.
Devant eux, une journée, une nouvelle journée, avec sa liberté et ses virtualités illimitées.
Dezsö Kosztolányi, Kornél Esti, Cambourakis, p. 90.
Le partage final n’est pas entre homos et ceux que ceux-ci appellent hétéros (être un hétéro, c’est être quelqu’un qui accepte que les homos le baptisent, ce qui est tout de même assez gratiné). Il est entre ceux qui demandent l’enfant et ceux qui le refusent. La majorité des homos demandent l’enfant.
Philippe Muray, « 30 juin 1985 », Ultima necat (I), Les Belles Lettres, p. 556.