publiés

Les Anciens pourraient dire à raison que leurs poèmes, simplement chantés, étaient publiés, tandis que nos livres, imprimés, restent toujours inédits.

Giacomo Leopardi, Zibaldone, Le Temps Qu’il Fait.

David Farreny, 4 nov. 2002
éternels

Antenne télévision en rouge et blanc se détache sur ciel pâle, en haut d’une colline où les arbres ont été rasés du sommet pelé. La ceinture des paraboles de réception, six haubans, et au sommet le court cylindre de l’émetteur, une lampe blanche clignote pour prévenir d’improbables avions égarés, un bâtiment bas au pied et les éternels grillages clos.

François Bon, Paysage fer, Verdier, p. 10.

David Farreny, 24 janv. 2003
viendra

L’avenir viendra d’une longue douleur et d’un long silence.

Cesare Pavese, Le métier de vivre, Gallimard, p. 38.

David Farreny, 24 mai 2003
salut

Il sait dire bonjour le matin, à midi, après midi, bonne nuit, au revoir, en bambara, il sait dire merci, soleil, argent — quelle pitié ! C’est un enfant, il commence à peine à parler, et déjà on le lâche en Afrique ! Oreille rouge rend leur salut à tous les passants. Il harcèle les gamins avec ses crayons, ses ballons. Il répond lui aussi en agitant le bras aux joyeux moulinets de cette fillette qui, à mieux y regarder, secoue sa salade.

Éric Chevillard, Oreille rouge, Minuit, p. 52.

David Farreny, 20 nov. 2005
rien

Il ne se passe rien, même quand il se passe quelque chose.

Henri Michaux, « En marge d’En rêvant à des peintures énigmatiques », Œuvres complètes (3), Gallimard, p. 718.

David Farreny, 15 juin 2006
glaires

Accepteriez-vous de nous montrer un échantillon de vos brouillons ?

— Je suis au regret de devoir refuser. Seules les nullités ambitieuses ou les médiocrités joviales exhibent leurs brouillons. C’est un peu comme si l’on distribuait des échantillons de ses propres glaires.

Vladimir Nabokov, Partis pris, Julliard, p. 12.

David Farreny, 4 mars 2008
marquées

Nos relations dès le début furent marquées par l’absence totale d’agressivité et par une sorte de camaraderie peu expansive, telle qu’elle se développe entre gueux après une catastrophe cosmique ou longtemps avant la révolution mondiale.

Antoine Volodine, Des anges mineurs, Seuil, p. 83.

Cécile Carret, 10 sept. 2010
on

On s’étonne aussitôt que Marconi soit parvenu à ses fins par des moyens si simples. On s’interroge sur lui. On ignore qu’il n’a fait qu’user habilement d’un des brevets, le n° 645.576, déposé par Gregor quelques années plus tôt mais insuffisamment protégé. On n’a pas le moyen de savoir que ce brevet a été anonymement posté à Marconi. Le saurait-on qu’on pourrait se demander, en étudiant l’adresse manuscrite sur l’enveloppe qui le contenait, si ne s’y distingueraient pas des points communs avec l’écriture d’Angus Napier. Même si, quarante-deux ans plus tard, la Cour suprême reconnaîtra l’antériorité des travaux de Gregor en matière de transmission radio, en attendant, quarante-deux ans plus tôt, c’est encore un sale coup pour lui.

Jean Echenoz, Des éclairs, Minuit, p. 121.

Cécile Carret, 11 oct. 2010
extra-souple

Essayer de voir comme démodée cette phrase même : « Essayer de tout voir comme démodé. »

Phrase invertébrée, lâche, extra-souple, avec son départ très moderne, très démodé, sur un infinitif qu’on pourrait nommer « suggestif », ou « invitatif », et aussi « collectif », qui n’est franchement ni un ordre, ni un souhait, ni un conseil, et qui s’adresse, infinitivement vague, à tout le monde, à personne, et reste en même temps ouvert et fermé et nous entraîne, comme les portes tournantes des hôtels et des grands magasins, — un infinitif analogue au substantif non précédé de l’article (Commutateurs) et qui se trouve chez la plupart des auteurs de ce temps.

Mais, à le considérer attentivement, c’est aussi un départ, une mise en marche, sans heurt et sans à-coup, qui ne manque pas de grâce, d’une grâce durable : départ infinitif, sans limites temporelles ni appuis personnels, nuée qui passe et se dissout dans la lumière intérieure, parole en l’air, semence errante et transportée.

Mais la phrase qui a été pensée et construite sur lui est encore incomplète : il y avait deux points, et non pas un point final, après « démodé et périmé ». Il convient à présent de la reprendre et de la terminer :

Essayer de tout voir comme démodé et périmé est d’abord une souffrance, mais ensuite un réconfort, pour l’esprit.

Valery Larbaud, « Aux couleurs de Rome », Œuvres, Gallimard, p. 1052.

David Farreny, 19 nov. 2010
engrenage

Nos poumons et nos bronches se mettent au repos – pompes sans cesse activées pour lutter contre l’asphyxie qui à chaque instant nous menace : inspiration, expiration, celle-ci suivie de funérailles. L’œuvre de Dino Egger eût brisé cet engrenage fatal, apaisé notre halètement. Nous recouvrons le calme propice aux pensées délicates, aux amples conceptions, aux affections durables. Notre cœur cependant bat toujours : c’est l’émotion.

Éric Chevillard, Dino Egger, Minuit, p. 102.

Cécile Carret, 18 fév. 2011
ensemble

Nous deux à jamais ensemble en habit de moments révolus.

Petr Král, Cahiers de Paris, Flammarion, p. 280.

David Farreny, 2 avr. 2013

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