cohérence

Mais la seule cohérence qui vaille, c’est celle qui arrive à répondre, en profondeur, de toutes les incohérences de surface.

Renaud Camus, « jeudi 21 janvier 1999 », Retour à Canossa. Journal 1999, Fayard, p. 65.

David Farreny, 20 mars 2002
conservatoire

Il faut donc dire que la même source de perturbations, de « bruit » qui, dans un système non vivant, c’est-à-dire non réplicatif, abolirait peu à peu toute structure, est à l’origine de l’évolution dans la biosphère, et rend compte de sa totale liberté créatrice, grâce à ce conservatoire du hasard, sourd au bruit autant qu’à la musique : la structure réplicative de l’ADN.

Jacques Monod, Le hasard et la nécessité. Essai sur la philosophie naturelle de la biologie moderne, Seuil, p. 152.

Guillaume Colnot, 14 avr. 2002
connu

Rien n’est jamais aimé, rien n’est jamais connu.

Renaud Camus, L’épuisant désir de ces choses, P.O.L., p. 115.

David Farreny, 11 fév. 2006
enrobé

Parce que les hommes en général ne m’intéressent pas. En dehors, bien entendu, de nombreuses exceptions, mais enfin, tout ce que j’affirme doit être compris comme enrobé d’exceptions.

Richard Millet, propos recueillis par Romaric Sangars, « Chronic’art », numéro 32, février 2007.

David Farreny, 16 mai 2007
centre

À titre personnel, je préfère les personnages « entre deux âges » ; je ne me suis jamais intéressé — et ne m’intéresse toujours pas — aux riches, ni aux pauvres, ni aux hommes politiques, ni aux délinquants, ni aux artistes (mis à part le cas particulier de l’artiste raté, qui me paraît emblématique : on est tous un peu ratés, on est tous un peu artistes). En matière de description sociale, je suis définitivement classes moyennes ; mais ce concept social-démocrate n’a peut-être aucun sens en zone parfaitement libérale. Au milieu de l’aéroport de Houston, juste avant de m’envoler vers l’Europe, je prends clairement conscience qu’au-delà des différences dans la mise en œuvre de nos deux stratégies, on peut probablement y déceler un même objectif : viser en plein centre.

Michel Houellebecq, « Compte rendu de mission : viser en plein centre », Lanzarote, Flammarion, p. 69.

Élisabeth Mazeron, 4 mars 2008
morale

Bien entendu j’ai toujours été persuadé (et je suis bien placé pour l’être) que la demande d’amour, d’admiration, de gratification narcissique, comme disait Barthes, est une des pulsions les plus profondément fichées au cœur de l’homme, et de la femme, de tous les hommes et de toutes les femmes. Il n’y a de différence morale, et intellectuelle, et sociale, d’inégalité en matière de décence, de bonne éducation, de maîtrise de soi, qu’en le degré de complication et en la sophistication des moyens qu’emploient les uns et les autres pour apaiser plus ou moins discrètement cette pulsion toujours affamée, toujours réclamante, en lui offrant des leurres, des procrastinations, ou en essayant de la renverser en des contraires qui ne soient pas trop visiblement des contraires, et donc des équivalents symétriques. L’orgueil, les raffinements et les silences qu’il impose sont sans doute le meilleur moyen qui existe pour tâcher de museler la vanité.

Renaud Camus, « dimanche 5 mars 2006 », L’isolation. Journal 2006, Fayard, p. 119.

David Farreny, 28 juil. 2009
comprend

La femme : « Aujourd’hui je suis allée en ville avec Stéphane. Il ne me comprend pas, les banques, les stations-service, les stations de métro, il trouve ça magnifique. »

L’éditeur : « Peut-être y a-t-il là-dedans une beauté nouvelle que nous ne pouvons simplement pas encore voir. »

Peter Handke, La femme gauchère, Gallimard, p. 61.

Cécile Carret, 26 juin 2013
ramonées

Treizième arrondissement, derrière le boulevard de la Gare. Tours neuves des « résidences », enfoncées une à une dans la glaise comme les pieux d’un barrage, grues, fouilles, terrassements qui tranchent par un côté comme un massicot une colline d’une quinzaine de mètres. Tout ce dévalement morne et disgracié de la Butte-aux-Cailles vers la Seine, au-delà du vaste enclos bâti de la Salpêtrière — bizarre fief onomastique de Jeanne d’Arc : rue Lahire, rue Dunois, rue Xaintrailles, rue Richemont, rues de Reims, de Domrémy, de Patay (Gilles de Rais n’a pas la sienne) coupé en son milieu par l’énigmatique rue du Château-des-Rentiers — tout ce quartier bouleversé, éventré, rasé, hérissé de donjons de béton, évoque aujourd’hui São Paulo plus que Lutèce ; quelques fragments de sordides petites rues jamais ramonées débouchent, tranchées net comme les tronçons d’une tuyauterie oxydée, sur les terre-pleins boueux où champignonnent les casques jaunes. Aucun quartier de Paris ne connaît une mutation aussi brutale, aussi massive : c’est ici de la chirurgie lourde de greffe d’organes à côté des implants et des inlets d’une délicate prothèse dentaire.

Julien Gracq, Lettrines (II), José Corti, pp. 2-3.

David Farreny, 18 oct. 2014
indulgence

J’ai pris la position du dormeur

et j’ai dormi

Évanouies l’exacte souffrance

l’anodine impuissance

Et maintenant l’automne me prodigue

l’infinie douceur de ses lumières dernières

ses fumées si peu indéchiffrables…

Un rouge-gorge rivalise avec le couchant

je me sens plein d’indulgence

pour les autos.

Jean-Pierre Georges, Où être bien, Le Dé bleu, p. 89.

David Farreny, 28 fév. 2016
intersection

Tous deux mentent allègrement ; à l’intersection de ce qu’ils ne se disent pas sur leurs désirs incompatibles, l’enfant paraît.

Philippe Muray, « 24 février 1990 », Ultima necat (III), Les Belles Lettres, p. 299.

David Farreny, 29 fév. 2024

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