Le Passé est une fatalité à rebours.
Jean-Paul Sartre, « Ontologie de la temporalité », L’être et le néant, Gallimard, p. 186.
Le visqueux est l’agonie de l’eau ; il se donne lui-même comme un phénomène en devenir, il n’a pas la permanence dans le changement de l’eau, mais au contraire il représente comme une coupe opérée dans un changement d’état. Cette instabilité figée du visqueux décourage la possession. L’eau est plus fuyante, mais on peut la posséder dans sa fuite même, en tant que fuyante. Le visqueux fuit d’une fuite épaisse qui ressemble à celle de l’eau comme le vol lourd et à ras de terre de la poule ressemble à celui de l’épervier.
Jean-Paul Sartre, « De la qualité comme révélatrice de l’être », L’être et le néant, Gallimard, p. 669.
Qu’est-ce donc qu’un texte poétique dans l’espace de la francophonie ? C’est une kyrielle de mots qui chantent encore et encore la beauté dans toutes ses nuances ; c’est le sourire de quelqu’un qui voyage vers tous ; c’est une missive inspirée par la flamme de l’amour et qui déploie pour l’utopie des ailes d’oiseau…
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Au réel, déjà dissous par la technique dans le virtuel, la langue en fête substitue les colombes de la propagande et l’abstraite ferveur des clichés. Tandis que l’écran dématérialise l’existence, l’écrit la délivre de ses impuretés. La terre et le terre-à-terre, le géographique et le trivial sont congédiés simultanément. L’angélisme triomphe avec l’artificialisme. Il n’y a de poésie, pour la culture en mouvement, que dans l’oubli lyrique du monde concret. Le oui extatique à la vie que profère cette muse est un non catégorique à l’intelligence de l’humain, et son grand message de paix et d’amitié, une fermeture au donné, froide, définitive, implacable.
Alain Finkielkraut, « Les transports lyriques de l’âme fermée », L’imparfait du présent, Gallimard, pp. 84-85.
Attends, a-t-il dit, il faut que je te montre la maison, et, même si je n’avais pas très envie d’une visite guidée, je me suis senti bien dans sa phrase.
Christian Oster, Rouler, L’Olivier, p. 101.
Il y a quelque chose qui m’a toujours étonné. C’est la difficulté qu’on éprouve à se trouver des défauts. Et comme ceux des autres nous sautent aux yeux. La sincérité envers soi-même, ce n’est sans doute pas autre chose que ce regard d’un autre en soi, regard rarement bien placé, changeant, « objectif ». On éprouve l’impression de sincérité quand l’angle est bon, c’est-à-dire écartelant.
Georges Perros, « Feuilles mortes », Papiers collés (3), Gallimard, p. 267.
Je vis à fond l’instant passé.
Éric Chevillard, « mardi 2 juillet 2013 », L’autofictif. 🔗
Que fait ce galopin sur une trottinette ?
Éric Chevillard, « vendredi 15 janvier 2016 », L’autofictif. 🔗
Les autobiographies intéressantes pourraient abonder si écrire la vérité ne constituait pas un problème esthétique.
Nicolás Gómez Dávila, Carnets d'un vaincu. Scolies pour un texte implicite, L'Arche, p. 36.
J’andropause en majesté sur mon trône vermoulu, contemplant d’un œil mort mes sujettes à caution.
Éric Chevillard, « mardi 17 octobre 2023 », L’autofictif. 🔗